Je n’aime pas trop conduire. Mais quand il m’arrive de prendre la voiture, je ne peux m’empêcher de remarquer les comportements individualistes et peu courtois de l’automobiliste moyen. Et il n’est pas rare qu’un juron m’échappe lorsque je suis témoin (ou victime) d’une brusque accélération au dessus des limitations de vitesse, d’un queue de poisson, ou n’importe quel comportement incivique.

Lors de ma dernière sortie, je me suis demandé ce qui m’agaçait autant chez les autres conducteurs. Il est rare que je m’énerve contre quelqu’un, alors pourquoi me surprends-je à crier « regardez-moi ce gros con ! », tout seul, derrière mon volant ?

Et puis, je crois que j’ai compris. J’ai repensé à mon propre article, « Et si le gros con, c’était vous ? » et je me suis posé sincèrement la question. Et je crois bien qu’au volant, le gros con, c’est moi.

Tous des abrutis, même moi


La route
Cormac McCarthy

Le problème des voitures, c’est qu’on ne voit pas le visage de l’autre conducteur. Pas moyen de savoir si c’est une jeune mère avec trois gamins, une petite vieille un peu paumée, ou un quincagénaire un peu distrait parce qu’il a de sérieux problèmes au boulot.

Cette absence de contact visuel me prive d’une des facultés humaines les plus importantes : l’empathie. Je deviens incapable de me mettre à la place de l’autre. Au lieu de lui imaginer des excuses et d’être plus tolérant, je suppose automatiquement que ce conducteur est un gros con individualiste et malpoli.

Et pourquoi est-ce le cas ? Pourquoi est-ce ce comportement que, par défaut, je projette sur les autres voitures ? Il me semble que, tout simplement, c’est parce que c’est mon propre état d’esprit quand je suis au volant. Au volant, je suis un individualiste discourtois, et je ne peux m’empêcher de m’imaginer que c’est le cas de tous les autres.

Comment y remédier ? Comment arrêter de voir des gros cons dans toutes les voitures ? À mon avis, il faut changer soi même d’état d’esprit. Commençons par adopter la courtoisie et l’altruisme au volant, et supposer que c’est le cas de tout le monde. Toujours laisser passer les piétons avec un sourire, respecter les priorités, ne pas chercher à griller trois places dans une file en provoquant des embouteillages, etc. Au lieu de chercher à aller le plus vite possible, considérer que maintenir un trafic fluide est un travail d’équipe : attendre son tour pour s’insérer dans une file, adopter une conduite souple et fluide, etc.

Et surtout, se retenir d’insulter copieusement les autres conducteurs. Les insulterais-je ainsi s’ils étaient en face de moi ? Sûrement pas. N’oublions pas que dans la voiture, monstre de métal impersonnel, se trouve un être humain.

photo by: vonderauvisuals

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4 thoughts on “Les automobilistes sont-ils tous des abrutis ?

  1. Je suis tout à fait d’accord avec votre article. Je l’ai toujours pensé.

    Et c’est pourquoi j’essaie toujours de voir le visage du conducteur, plutôt que de me focaliser sur la forme d’une voiture qui ressemble à toutes les autres, et dont l’aspect, simple ou luxueux ouvre la porte à tous les fantasmes.

    C’est pourquoi j’ai imaginé qu’un jour on aura un moyen de communiquer oralement avec les conducteurs proches. Un système mains libres et quadraphonique pour savoir de quel direction provient la voix qu’on entend.

  2. Sans traiter les autres automobilistes de « gros cons » il faut tout de même reconnaitre qu’il y a beaucoup d’incivilités sur la route et pour un certain nombre d’entre c’est : « moi d’abord ».
    Quand je vois la façon dont quelqu’uns conduisent je me dit que l’essence n’est pas chère. Avec une conduite souple et non stressante certains automobilistes pourraient économiser jusqu’à 2 litres au 100 kms et tout le monde gagnerait en sérénité et même en sécurité.
    Je ne suis pas sûr que l’empathie suffise.
    Un travail sur soi, une prise de conscience est aussi nécessaire. Qu’est ce que la voiture pour moi ? Un moyen de transport ou un prolongement de moi même ? Juste une citation pour y réfléchir ; vous demandez à un ami où il a garé sa voiture et il vous réponds : je suis garé à 100m d’ici.

  3. Bien que je sois un grand fan de vos articles, je ne peux m’empêcher de remarquer que vous n’avez pas abordé un aspect important du sujet.
    La plupart des conducteurs perçoivent leur voiture comme une extension de chez eux. Par conséquent, ils voient chaque incivilité comme une attaque personnelle, un affront qui leur est fait sur leur propre territoire. Cela a pour conséquence les rendre très agressifs.

  4. En voiture, plus qu’ailleurs, on a effectivement tendance à être agressif avec les autres, à les juger et les condamner, et à n’estimer que eux seuls sont fautifs, sans aucune justification ou circonstance atténuante.

    J’avais lu, je ne sais plus où, que cela venait du fait qu’on estimait la voiture comme un extension de notre maison. Et qu’à partir de là on réagit violemment à tout ce qu’on « subit » depuis notre voiture car on y accepte pas plus ce qu’on accepterait pas chez nous … Grosso modo :-)

    Je fus comme cela un temps. Et parfois, je dérape encore :-(

    Maintenant, j’essaie autant que possible de rester passif et placide. Tant qu’on ne m’agresse pas physiquement et que moi et mes passagers ne sommes pas mis en danger, le reste a bien peu d’importance …

    De plus, je tache aussi de ne pas voir mes trajets comme une course. Au sens premier du terme. Gagner quelques minutes au quotidien, au prix d’un certain stress, ce n’est pas bien grave. En retour, je suis moins réactif : cela amplifie donc le point précédent.

    En plus, c’est bien mieux pour le véhicule et la consommation d’essence :-)

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